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Que viens-tu demander à ce monde nocturne ?
Un dieu ! Pourquoi viens-tu plonger ta main dans l’urne ?
Job en tire Satan et Mahomet Iblis.
Les goufres ont-ils Dieu dans leurs profonds oublis ?
Ce Dieu sert-il de centre à leurs circonférences ?
Le voit-on à travers leurs sombres transparences ?
Ou bien est-ce Tout, cette âpre immensité.
Ce ciel, que vous prenez pour une volonté ?
Sont-ce ces profondeurs, ces vents, ces fondrières.
Ces forêts de nuées aux livides clairières.
Ces éléments, ces nuits, ces mornes régions.
Que vous appelez Dieu dans vos religions ?
Avez-vous pour mirage, ô fils du cimetière,
De voir la chose Dieu sous la chose Matière ?
Est-ce Dieu qui paraît, quand s’enfuit l’alcyon ;
Quand l’hydre de l’écume entre en convulsion ;
Quand partout on entend dans la sombre nature
Comme un bruit d’ouragan brisant une mâture,
Quand le ciel lamentable éclate en tristes voix ;
Quand le nuage accourt ; quand les bêtes des bois
Tremblent ; quand les lions hagards, baissent la tète
Sous des écrasements d’éclairs et de tempête ?
Est-ce lui que la mer appelle en sa clameur ?
Qui jette dans l’azur des chiffres et des nombres,
De la graine d’abîme éclose en larves sombres,
Des vivants comme nous qui te semblent des morts,
Des esprits comme toi qui nous semblent des corps,
Et qui voit, dans le champ des espaces sonores,
Ondoyer des épis d’étoiles et d’aurores ?
Qui peut répondre oui ? qui peut répondre non ?
Un geôlier rôde-t-il autour du cabanon ?
Qu’importe ! Vis. Tais-toi. Vas-t-en. Aime ton père,
Ta mère et tes enfants. Qui cherche désespère.
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HUGO
Les Voix
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