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Ils sont deux combattants. Le combat, c’est le monde.
L’un, qui mêle à l’azur sa chevelure blonde,
Est l’ange ; il est celui qui, dans le gouffre obscur,
Apporte la clarté, le lyse, le bonheur pur ;
du monstre aux pieds hideux il traverse les toiles ;
Sur sa robe frissonne un tremblement d’étoiles ;
Il est beau ! Semant l’être et le germe aux limons,
Allumant des blancheurs sur la cime des monts,
Et pénétrant d’un feu mystérieux les choses,
Il vient, et l’on voit l’aube à travers ses doigts roses ;
Et tout rit ; l’herbe est verte et les hommes sont doux.
L’autre surgit à l’heure où pleurent à genoux
Les mères et les soeurs, Rachel, Hécube, Electre ;
Le soir monstrueux fait apparaître le spectre ;
Il sort du vaste ennui de l’ombre qui descend ;
Il arrêt la sève et fait couleur le sang ;
Le jardin sous ses pieds se change en ossuaire ;
De l’horreur infinie il traîne le suaire ;
Il sort pour faire faire aux ténèbres le mal ;
Morne, en l’être charnel comme en l’être aromal
Il pénètre ; et, pendant qu’à l’autre bout du monde,
Abattant les rameaux du crime qu’il émonde,
L’éblouissant Ormus met sur son front vermeil
Cette tiare d’or qu’on nomme le soleil,
Lui, sur l’horizon noir, sinistre, à la nuit brune,
Se dresse avec le masque horrible de la lune,
Et jetant à tout astre un regard de côté,
Rôde, voleur de l’ombre et de l’immensité.
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V. HUGO
(Dieu)
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